Pages précédentes :

Le Pot au Noir

Le 20/12/2006 à 22h46 (heure française)
5°01 N 26°58 W

On l’attendait depuis longtemps, ce Pot au noir bien connu des marins et qui marque le milieu de l’Atlantique, la zone équatoriale…Notre ami Corentin, nos « yeux » à terre, qui nous renseigne sur la météo nous l’avait situé par 6°Nord, et il était au rendez-vous.
Ca avait commencé par une journée idéale : une pêche enfin fructueuse avec 2 superbes dorades dorées de 7-8kg, des baignades dans une eau plus chaude que l’air, une métamorphose des dorades en boulettes de poisson aux épices délicieuses…On est tous les 3, le bateau avance, la vie est belle !
Puis on a senti que l’Alizé qui nous accompagnait confortablement depuis le Cap Vert, nous guidant presque à vitesse constante depuis des centaines de milles, commençait à montrer des signes de faiblesse, jusqu’à laisser insidieusement place à un calme surprenant. Au milieu de l’Atlantique, sans vent ?Juste quelques nuages plus sombres que d’habitude, et des flashs dans les nuages, témoins d’éclairs éparses en altitude.
Nous est tombé dessus notre premier grain tropical. Jamais calme avant la tempête n’avait paru expression plus juste. Un déchaînement. Nous étions dans un chaudron de sorcière animé de remous, d’éclairs et de vents tourbillonnants de plus de 35 nœuds.
En 3 minutes, le bateau avait déjà 2 tours sur lui-même en cherchant une amure fixe sans succès, nous barrions avec pour seuls repères les nuances grises et noires du ciel et de la mer qui se fondaient l’une dans l’autre. Les claquements de la grand voile eurent raison du chariot d’écoute qui s’est arraché, transformant notre bôme en masse qui battait l’air sans contrôle. Une pluie diluvienne qui remplissait les seaux en moins d’1 minute ( essayez pendant une tempête en Bretagne pour voir !)nous trempait jusqu’aux os..
Pierre a alors essayé de mettre le moteur pour nous permettre de caper et rester manœuvrant…Et c’est là que nos ennuis ont commencés !
Déjà, avant d’arriver au Pot au noir, on coulait doucement par le presse étoupe, zone de faiblesse connue des bateaux qui permet à l’arbre d’hélice de sortir de la coque tout en empêchant l’eau de rentrer. Il fuyait donc, à raison de 2 seaux, 20L par heure. Ca fait plus de 2 grandes baignoires par jour, et même si le bateau est grand, on était pas chaud pour y installer une piscine! Et puis c’est désagréable, les planchers qui flottent, on n’est pas habitués, et ça fait froid aux pieds…
Donc au démarrage, le moteur est parti dans un bruit suraigu de frottement qui nous a fait l’arrêter immédiatement, et redouter le pire : sans moteur, pas de Pot au noir.
Le grain s’est calmé quelques heures après non sans nous avoir douché 2-3 fois ( Hollywood !), puis s’est calmé, nous permettant de faire le tour du problème. Nous avions toujours l’hélice, aucun calamar géant ne s’était accroché au safran (merci Jules Vernes ! les vieilles craintes ont la vie dure ! regardez notre Amiral…), mais un moteur bel et bien HS. Et nous, si on commence à comprendre un peu la mécanique humaine, celle de notre cher moteur…Non.
Le Pot au noir, situé entre 6°N et l’équateur, bien précis sur ces limites d’ailleurs, fait à cet endroit environ 400 milles de large. C’est une zone redoutée et peu fréquentée par les marins, car c’est là, à la faveur des grains, que naissent les cyclones qui iront grandir en remontant vers les Antilles. C’est une alternance de grain/calme plat/grain très fort/bascule de vent dans tous les sens…Sans moteur pour nous aider pendant les molles et avec un bateau aussi lourd que le nôtre, pas possible de traverser. Avec lui, nous perdions notre source de propulsion d’appoint, notre source d’électricité ( et donc d’instruments de navigation et de communication avec vous !), et pouvions passer plusieurs semaines à essayer de traverser.
A ces semaines de perdues s’ajoutent les probables semaines à sec, de réparation du presse étoupe et du moteur. Tout ce gâchis de temps pouvait compromettre jusqu’à notre passage dans les canaux..
Nous nous sommes arrachés les cheveux à essayer de trouver une solution, mais c’est la mort dans l’âme que nous avons fait demi tour, pour faire route vers les rassurantes Alizés et nous sortir de ce piège. L’objectif est de rejoindre les Antilles, d’où nous pourrons réparer, et continuer le voyage.
Impossible de baisser les bras: un an de préparation, un an de rêves et de partages, tout commençant bien… On va prendre du retard sur l’objectif, mais pas y renoncer. On vous emmènera avec nous voir les canaux de Patagonie!

Guillaume

--> Ecrire à M.V.A. (Guillaume, Pierre & Gildas) : asso.mva@gmail.com --> Ecrire au webmaster : webmasta.mva@gmail.com

Notre partenaire :